Manifeste: Reconstruire l'organisation sociale des soins

Au centre de ces crises se trouve le travail de soin historiquement assumé par les femmes. Les soins sont à l’image de la vie quotidienne et représentent le fondement de la vie elle-même - humaine et planétaire - et garantissent le fonctionnement de l’économie.

L'organisation sociale actuelle des soins : c’est-à-dire la manière dont l’offre de soins répond aux besoins; l'interrelation entre le travail de soins non rémunéré, ou sous-rémunéré, les dispositions publiques, privées et communautaires en matière de soins est fondamentalement déséquilibrée, inégale et, en fin de compte, non viable. Elle fait peser la charge, le poids et la majorité du travail nécessaire sur les soins et le travail domestique des femmes.

À la maison et au sein des communautés, par le biais de chaînes de soins mondiales où les femmes de couleur et noires des pays du Sud, vivant dans la pauvreté, comblent le manque de soins en étant sous-payées et dans des conditions de travail précaires par le biais de services, tant publics que privés. Cette injustice est doublée et triplée dans le cas des femmes qui subissent des formes multiples et croisées de discrimination en raison de leur classe, de leur race, de leur orientation/identification sexuelle, de leur handicap, de leur âge ou de leur statut de migrante, entre autres dimensions.

Cette crise des soins, sous-tendue par une division internationale du travail fondée sur le sexe et la race, doit cesser !

Les États excusent souvent leur incapacité à respecter les droits des femmes en invoquant leur manque de ressources financières. Le système fiscal international défaillant - et le système économique néolibéral dans son ensemble - continue de faciliter la confiscation des richesses des populations - en particulier du Sud – au profit d'une élite - principalement des hommes du Nord.

Dans le même temps, la déréglementation, la privatisation, la consolidation fiscale (austérité) et le poids écrasant de la dette néocoloniale ne font qu'accentuer ces déséquilibres de pouvoir extrêmes entre les femmes et les hommes, le Sud et le Nord, les travailleurs/euses et les entreprises. Cela épuise les ressources mondiales et locales pour financer des services de soins publics de qualité et permettre un travail de soins décent et bien rémunéré ainsi qu'une protection sociale universelle.

Dans ce contexte, les politiques fiscales nationales régressives, souvent encouragées ou imposées par les institutions financières internationales, sapent la responsabilité des États de fournir des services publics garantissant les droits.

Nous exigeons la fin du paradigme et du système économique dominants qui non seulement sapent les droits des femmes mais exacerbent les inégalités entre les genres. Nous exigeons la fin du manque de volontarisme, d'attribution de ressources et de capacité des États à organiser les soins comme un bien public. Nous rejetons et contestons la mainmise des entreprises sur de nombreux États qui ne respectent pas leur obligation de respecter, protéger et garantir les droits humains. Nous demandons aux États de faire des soins un bien public et une responsabilité sociale collective, plutôt qu'une responsabilité "privée" des ménages qui incombe principalement aux femmes. Cette voie mène à l'effondrement de l'humanité et de la planète, car elle annihile les femmes. Nous devons y mettre fin maintenant !

Nous appelons à l'élaboration d'un mouvement mondial visant à reconstruire l'organisation sociale des soins en unissant nos forces :

  • Reconnaître la valeur sociale et économique du travail de soins (rémunéré ou non) et le droit humain aux soins.

  • Récompenser, rémunérer et représent les travailleurs.euses du secteur des soins et de la santé qui doivent pouvoir bénéficier d'un travail professionnalisé, d'un salaire égal pour un travail de valeur égale, de pensions adéquates, d'une protection sociale complète, de conditions de travail saines et sûres, d'une représentation forte et du plein exercice de leurs droits à la syndicalisation, à la négociation collective et au dialogue social, conformément à l'Agenda pour le travail décent de l'OIT. [Mis à jour le 20 février 2024 original: Récompenser et rémunérer le travail de soins par un salaire égal pour un travail de valeur égale, des pensions décentes, des conditions de travail dignes et une protection sociale complète.]

  • Réduire la charge du travail de soins non rémunéré qui pèse sur les femmes.

  • Redistribuer le travail de soins au sein des ménages, entre tous les travailleurs/euses, en éliminant la division sexuelle du travail et entre les ménages et l'État.

  • Récupérer la nature publique des services de soins et restaurer le devoir et la responsabilité première de l'État de fournir des services de soins publics et de développer des systèmes de soins qui transforment les relations entre genres et la vie des femmes - notamment en finançant la capacité de l'État à investir par le biais d'une fiscalité équitable et progressive et en garantissant l'égalité internationale des droits de taxation des États nations.

#MakeCarePublic - #MakeTaxesWorkForWomen

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